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Agamemnon à mon retour du supermarché, j'ai flanqué une raclée à mon fils (création)
par la Compagnie Push-Up et Le Cinquième Quartier (CH)
DU 18 AU 28 SEPTEMBRE 2014 | jeudi à 19h, vendredi à 20h30, samedi à 19h et dimanche à 17h
Distribution
texte : Rodrigo Garcia
conception et jeu : Pauline Epiney et Christian Waldmann
musique et jeu
: Alain Mudry
collaboration artistique : Sébastien Ribaux
décor et costumes : Scilla Ilardo
création lumière : Jean-Etienne Bettler
traduction : Christilla Vasserot (Les Solitaires Intempestifs)
administration : Désirée Domig
production : Compagnie Push-Up et Le Cinquième Quartier
coproduction : CMA–Petithéâtre de Sion et Théâtre 2.21 (Lausanne)
avec le soutien de : Ville de Sion, Service de la Culture de l'État du Valais, Loterie Romande, Ernst Göhner Stiftung, Fondation Engelberts, Pourcent Culturel Migros
Le spectacle
C'est l'histoire d'un père de famille qui, pour épater sa femme et son fils, part faire les courses pour le mois. Celles-ci vont se transformer en véritable expédition. À son retour du supermarché, il constate qu'il a acheté que ce dont il n'avait pas besoin et qu'il a oublié d'acheter ce dont il avait réellement besoin. Cela le rend dingue. C'est dingue d'acheter des pâtes aux épinards, quand personne à la maison n'aime les épinards. Alors ce père de famille va se transformer en tyran à la petite semaine et se défouler avec violence sur sa femme et son fils. Et parce qu'il faut éviter de finir à l'hôpital, il décide de les emmener faire une balade « quelque part ».
Et cette balade va nous emmener d'un ciel étoilé perdu au milieu d'un vignoble, à un fast-food au bord de la route. Cela va être l'occasion de partager les absurdités qui nous entourent et va permettre à ce père de famille d'exposer sa vision du système consumériste et de tenter de démêler la Tragédie de l'Espoir.
S'il en reste...
L'auteur, le texte et son contexte et extraits
L'AUTEUR
Rodrigo Garcia est un auteur et metteur en scène argentin né à Buenos Aires en 1964, il est venu vivre à Madrid où il travaille depuis 1986. Il y a fondé en 1989 la compagnie Carnicería Teatro. La plupart des pièces de l'auteur concernent l'actualité. Même s'il peut sembler particulièrement périlleux de traiter de politique au théâtre à notre époque où la télévision se livre à la dramatisation continuelle des événements politiques, économiques et sociaux, Rodrigo Garcia ose proposer un théâtre, contestant la mondialisation et dénonçant la concentration des pouvoirs. Son théâtre nous éclaire sur sa vision d'une certaine réalité sociale de l'Occident actuel, laissant entrevoir un homme en proie à un environnement qui l'opprime, le tyrannise, un monde où la notion de valeur n'est plus que marchande.
Son écriture a un caractère audacieux et violent ; la structure en est poétique, parfois rythmique. Comme la société accumule les produits et martèle les discours publicitaires, Rodrigo Garcia, de manière mimétique, accumule, empile phrase sur phrase.
Les mots jaillissent tant bien que mal, évoquant les non-événements qui constituent la vie d'un individu dans les rouages d'une société néo-libérale accomplie.
Eleni Papalexi
LE CHOIX DU TEXTE
L'idéologie dominante transforme toute contestation de son système en marchandise ou en acte terroriste. Ce système implacable continue à gaspiller sciemment les ressources et à fabriquer des échoués, malgré son opulence. Le temps qui passe nous aide à nous accommoder tant bien que mal au fait de voir cohabiter la précarité avec la richesse, de voir notre environnement se dérégler lentement, mais sûrement.
Nous avons sélectionné des phénomènes écologiques et nous avons cherché comment ils pourraient venir perturber petit à petit le déroulement de l'acte théâtral, comme ils viennent perturber les autres éco-systèmes.
Alors qu'un homme se démène avec ses réflexions et ses contradictions de manière égo-centrée, l'environnement va insidieusement dégrader le biotope théâtral qui l'entoure.
L'absurdité de nos contradictions nous a convaincu de choisir Agamemnon, dix ans après sa création, pour participer à notre manière à la valse des mécontents.
Nous espérons provoquer un rire de résistance.
LES THÈMES
A la lecture du texte de Rodrigo Garcia, il se dépose sur nos lèvres un goût amer et dangereusement salé d'après déluge, une sensation de course en avant effrénée où il semble impossible de trouver une prise à laquelle s'agripper pour se stopper un instant, rompre le mouvement, souffler, respirer, s'autoriser à penser, réfléchir et par chance rêver ! Et peut-être trouver ce fameux QUELQUE PART dont il est question dans le texte, s'allonger sous la lune cendrée et les étoiles en écoutant les grillons et en mangeant du raisin. Trouver un endroit et un moment à soi. Un répit. Afin de ne pas perdre pied !
« Agamemnon – A mon retour du supermarché, j'ai flanqué une raclée à mon fils » nous parle des problèmes de surconsommation, du pouvoir de l'argent, du fonctionnement de notre système, mais il met avant tout chacun de nous face à sa propre tragédie, celle d'être un homme au milieu de cet immense naufrage. Oui, il s'agit bien de tragédie, une tragédie contemporaine devenue banale et qui sonne comme une routine.
Comme une sensation de fin du monde...
Un monde dans lequel l'individualité devient denrée rare : Quelles sont nos valeurs personnelles ? A quels repères décidons-nous de nous attacher ? Quels sacrifices sommes nous prêts à faire et dans quels buts ? Qui écouter ? En qui ou en quoi croire ? C'est quoi l'espoir ?
EXTRAITS DU TEXTE
Extrait 1
A mon retour du supermarché, j'ai flanqué une raclée à mon fils.
A mon retour, je me suis rendu compte que j'avais acheté un tas de choses en double ou en triple.
Et, pour couronner le tout, j'avais acheté plein de choses que je déteste.
J'avais dit :
« On va aller au supermarché tous ensemble
on va y passer ce putain d'après-midi.
Ca vous plait, hein, de passer tout un putain d'après-midi au supermarché. »
Et puis j'ai réfléchi et j'ai dit :
« Restez plutôt à la maison.
J'y vais tout seul et vous allez voir ce que vous allez voir ! »
Je vais faire une surprise à ma famille.
Je vais faire les courses pour le mois
Tout seul comme un grand.
Extrait 2
J'ai acheté des piles pour la Gameboy du gamin,
mais pas de la bonne taille, bordel.
Et quand mon gamin me dit :
« Les piles que tu as achetées pour la Gameboy, c'est des piles qui vont sur la radio et sur le réveil mais pas sur la Gameboy »,
je lui flanque sa première beigne.
Sa deuxième beigne et sa troisième beigne.
Sa troisième beigne et sa quatrième beigne.
J'accumule les beignes jusqu'à ce que toutes ces beignes réunies méritent enfin d'être appelées une branlée.
Je continue à lui flanquer des beignes jusqu'à ce qu'on puisse appelé ça une BONNE branlée.
Je continue à allonger des beignes jusqu'à ce que cette BONNE branlée devienne une authentique raclée.
Et quand je vois que j'ai eu la main un peu lourde – la belle expression : « J'ai eu la main lourde » - je m'arrête.
Parce qu'il faut éviter d'atterrir à l'hôpital
Extrait 3
« On va aller dîner dehors, bordel !
Au restaurant. »
Eux, ils sont contents. On dirait deux crétins avec un stylo à la main.
Moi, je pense à ce que j'ai acheté au supermarché et ça me rend dingue.
J'ai acheté pour mon fils un pull jaune pétard qui lui va dix fois trop grand.
Je n'ai pas l'intention de retourner au supermarché pour échanger ce pull jaune pétard.
Pas plus que je n'ai envie de jeter ce pull à la poubelle.
Pas plus que je n'ai envie de donner ce pull.
Je vais attendre que mon gamin grandisse et que ce pull jaune pétard lui aille.
Mais pour grandir il doit se nourrir.
Alors il va se nourrir, bordel.
Il va se nourrir pour grandir.
Pour pouvoir mettre son pull jaune pétard.
Extrait 4
Les grillons font comme si de rien n'était et ils y vont de plus belle.
Et les étoiles font comme si de rien n'était.
Et les nez continuent à saigner.
Et nous, on va bien s'entendre, bordel.
On va bien s'entendre !
On va s'asseoir au milieu des vignes et cueillir des grappes de raisin.
Ca va nous dégouliner dessus, bordel.
Et on va manger du raisin.
Et on va cueillir des grappes.
Et ça va nous dégouliner dessus.
Et on va compter les étoiles.
Et vas-y les grillons.
Une bien jolie veillée, bordel.
On se gave de raisin sucré, on bavarde, on se regarde saigner.
Je savais que ça nous ferait du bien d'aller nous balader QUELQUE PART.
Extrait 5
Alors la serveuse du Kentucky dit :
« J'aimerais que sur internet il n'y ait que de la pornographie et rien d'autre que de la pornographie, car l'accumulation d'informations n'a rien à voir avec la connaissance.
Tenez de l'information, ils disent.
Tenez de la connaissance, ils disent.
Et moi je dis : l'information et la connaissance sont aux antipodes l'une de l'autre.
Ils nomment information un fatras de données banales. »
Moi je lâche : « Je crois que vous devenez un peu trop denses, têtes de nœud.»
La compagnie Push-Up
La Cie Push-Up est basée à Sierre et a été créé en avril 2011 sous l'initiative de Pauline Epiney.
La compagnie désire développer des projets permettant de questionner la vision dominante du monde. Proposer d'autres alternatives que celles subies du fait de notre conditionnement. Parler de la société humaine, de ses règles et de ses lois qui règnent sur nous d'une main de fer. En effet, nous subissons tous l'influence d'un modèle imposé, que quelque part nous consolidons à notre tour. La compagnie veut tendre à interroger notre façon de considérer la société et l'Etre Humain.
Les affiches du spectacle
Extraits et interviews vidéo dans l'émission Marmelade (Canal9)
"Un théâtre qui pose des questions", article de Joël Jenzer pour Le Nouvelliste (17.09.14)
Presse, documents et liens
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